Les éléments publiés sur Facebook peuvent être utilisés à l’appui d’un licenciement (Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 19-12.058 FS-PBRI)

29 mars 2021 | Droit du travail

Par un arrêt du 30 septembre 2020 (n° 19-12.058 FS-PBRI), la Chambre sociale de la Cour de cassation s’est prononcée sur le point de savoir si un employeur peut licencier pour faute grave un salarié en raison d’éléments que ce dernier a publiés sur son compte privé Facebook, mais surtout sur la question de la licéité de la preuve rapportée par l’employeur.

Les faits : une salariée, chef de projet export, a été licenciée pour faute grave notamment pour avoir manqué à son obligation contractuelle de confidentialité en publiant le 22 avril 2014 sur son compte Facebook une photographie de la nouvelle collection printemps/été 2015 présentée exclusivement aux commerciaux de la société.

Dans cette affaire, la publication Facebook litigieuse avait été spontanément communiquée à l’employeur par un courriel d’une autre salariée de l’entreprise autorisée à accéder comme « amie » sur le compte privé Facebook de la salariée licenciée.

La salariée a contesté son licenciement en soutenant en substance que l’employeur ne pouvait pas accéder aux informations extraites de son compte Facebook sans y avoir été autorisé et que la preuve ainsi rapportée était en tout état de cause inopposable/irrecevable.

La Cour d’Appel, suivie par la Cour de cassation, n’a pas retenu cette argumentation.

Dans son arrêt du 30 septembre, la Cour de cassation a tout « d’abord » rappelé  que : « … en vertu du principe de loyauté dans l’administration de la preuve, l’employeur ne peut avoir recours à un stratagème pour recueillir une preuve … ».

Elle a ensuite d’emblée constaté que : « … la publication litigieuse avait été spontanément communiquée à l’employeur par un courriel d’une autre salariée de l’entreprise autorisée à accéder comme « amie » sur le compte privé Facebook de Mme X…, [de sorte que] ce procédé d’obtention de preuve n’était pas déloyal … ».

Ce rappel est bienvenu. En effet, l’employeur peut utiliser une preuve au soutien d’un licenciement pour faute grave à la condition de n’avoir eu recours à aucun stratagème pour l’obtenir. À défaut, la preuve est jugée illicite et le licenciement prononcé sur cette base est sans cause réelle et sérieuse (ex. : cass. soc. 8 mars 2008, n° 06-40852).

Ensuite, dans son arrêt du 30 septembre 2020, la Chambre sociale rappelle le principe selon lequel le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.

En conclusion, la Cour, après avoir mis en balance les différents intérêts en jeu, admet que l’employeur puisse produire en justice une photographie publiée sur le compte privé Facebook d’une salariée et ce afin de justifier son licenciement pour manquement à l’obligation contractuelle de confidentialité.

De cet arrêt, il faut donc retenir que l’employeur peut motiver un licenciement en s’appuyant sur des éléments extraits du compte privé Facebook d’un salarié à la seule condition que les éléments aient été obtenus par un procédé loyal et que l’atteinte à la vie privée ne soit pas disproportionnée.

L’auteure de cet article, Maître Edith Dias Fernandes, Avocate à Amiens en droit du travail et en droit de la sécurité sociale, conseille et assiste régulièrement ses clients sur ce type de problématiques.