Contester les élections professionnelles avant même les élections, c’est possible !

28 mai 2021 | Droit du travail

Aux termes d’une décision en date du 12 mai 2021 (n° 19-23428 FP), la Cour de cassation juge que dans le cadre d’une instance visant à solliciter l’annulation d’un protocole préélectoral, une demande d’annulation des élections professionnelles peut être sollicitée en amont, soit avant même la tenue des élections.

En application de l’article R. 2314-24 du Code du Travail, lorsque la contestation porte sur la régularité de l’élection, la requête n’est recevable que si elle est remise ou adressée dans les 15 jours suivant cette élection.

Ce délai de contestation de la régularité de l’élection se calcule en jours et comprend les jours ouvrables et non ouvrables.

Le jour de l’élection, qui marque le point de départ du délai, ne compte pas et le délai expire le dernier jour à 24 heures. Il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant lorsqu’il expire normalement un samedi, un dimanche, ou un jour férié ou chômé (article 642 du Code de Procédure Civile).

Pour apprécier si le recours est fait dans le délai de 15 jours, il convient de prendre en considération la date de l’envoi de la déclaration et non celle de sa réception par le greffe du Tribunal (Cass. soc., 6 janv. 2011, n° 09-60.398).

Dans l’affaire examinée par la Cour de cassation, le juge de 1ère instance avait déduit de l’article R. 2314-24 du Code du Travail que la demande d’annulation des élections ne pouvait pas être faite avant lesdites élections, mais seulement après celles-ci. Le juge avait donc rejeté la demande d’annulation des élections du syndicat faite avant même la tenue des élections.

Cette position est censurée par la Cour de cassation au motif que « … celui qui saisit le Tribunal d’Instance [désormais Tribunal Judiciaire], avant les élections, d’une demande d’annulation du protocole préélectoral, est recevable à demander l’annulation des élections à venir en conséquence de l’annulation du protocole préélectoral sollicitée … ».

Cette position n’est en réalité pas nouvelle, mais il est intéressant de la voir confirmer concernant un litige portant sur une demande initiale d’annulation d’un protocole d’accord préélectoral. Ainsi, la Cour de cassation avait déjà jugé dans des arrêts très anciens que le délai de 15 jours étant un délai limite, le recours pouvait être présenté, même avant l’élection, dès que l’irrégularité est apparue et ce pour la régler et prévenir tout litige (Cass. soc., 22 avr. 1982, n° 81-60.865 ; Cass. soc., 4 juill. 1989, n° 88-60.547 ; Cass. soc., 21 juill. 1976, n° 76-60.085).

En pratique, de deux choses l’une :

– soit le requérant sollicite uniquement l’annulation du protocole préélectoral : dans ce cas il doit veiller, notamment si les élections ont lieu avant la décision du juge, à saisir de nouveau le Juge afin de demander l’annulation des élections et ce au plus tard dans le délai de 15 jours suivant les élections. A défaut, les élections sont purgées de tout vice. En effet, la seule décision judiciaire d’annulation du protocole préélectoral n’entraîne pas en elle-même la nullité du scrutin (Cass. soc. 4 juillet 2018, n° 17-21100 FSPB).

– soit, lors de la demande d’annulation du protocole préélectoral devant le Tribunal Judiciaire, le requérant sollicite également en amont l’annulation des élections professionnelles à venir, demande qui devra être examinée par le juge, peu important que les élections n’aient pas encore eu lieu.

En conclusion, vous pouvez contester les élections professionnelles dès que l’irrégularité survient et au plus tard dans les 15 jours suivant la tenue des élections.

L’auteure de cet article, Maître Edith Dias Fernandes, Avocate à Amiens en droit du travail et en droit de la sécurité sociale, conseille et assiste régulièrement ses clients sur ce type de problématiques.